Rencontres régionales de la transformation écologique
L’Agence Scalen a participé à la 2e édition des Rencontres régionales de la transformation écologique, organisées par Véolia, le 8 octobre 2024. Ce nouveau rendez-vous vise à rassembler experts et acteurs locaux pour échanger sur les défis écologiques du Grand Est.
La journée fut introduite par un constat de Jean-François NOGRETTE Directeur général de la Zone France et Déchets spéciaux Europe de Veolia : le dérèglement climatique est une réalité et la Région Grand Est n’est pas épargnée.
Afin de plutôt sonder ou connaître la prise de conscience de la population, Veolia a mené une enquête dont il est ressorti que :
- 92 % de la population se sent concernée par le changement climatique
- 70 % pense que l’action est nécessaire
- 66 % des agriculteurs disent que le changement climatique est un enjeu vital
Il faut donc énoncer des priorités, notamment sur la santé, l’alimentation et l’énergie.
TABLE-RONDE : LES NOUVEAUX DÉFIS DE L’EAU
Emma Haziza, docteure de l’École des Mines de Paris, hydrologue et experte sur les questions liées à l’eau.
Simon Porcher, professeur des Universités en sciences de gestion à l’Université Paris Panthéon Assas
Dominique Potier, député de la 5e circonscription de Meurthe-et-Moselle
« Dans le cycle de l’eau, une composante essentielle a été oubliée : l’humain ».
E.H. L’humain a profondément modifié les réservoirs d’eau au fil du temps, et plus encore ces dernières décennies : détournement des cours d’eau, convoitise de l’eau souterraine, etc. Cette eau est devenue un enjeu financier.
Aujourd’hui, 21 des plus grands aquifères du monde (sur 36) sont en voie d’extinction. Leur préservation est primordiale : elle est l’un des principaux enjeux des années à venir. En effet, la contrainte sur la disponibilité de la ressource en eau s’accroît, notamment du fait du changement climatique et de la croissante demande pour des usages divers. Les ressources en eaux souterraine peuvent être localement ou régionalement surexploitées.
Le cycle de l’eau est déstabilisé par plusieurs facteurs :
- Le réchauffement climatique : l’augmentation des températures assèche d’avantage les sols en raison de l’évaporation qui augmente considérablement et génère de fait des précipitations de plus en plus fortes. Par ailleurs, 50 % des inondations dans 5 ans se feront en dehors des zones inondables actuelles. Dans le sud de la France, on parle de crue et de sécheresse éclair.
- Le détournement des cours d’eau.
- L’augmentation des pompages.
L’enjeu : Adapter les territoires pour se préparer et aller vers des territoires résilients.
E.H. Les changements s’accélèrent : la France se réchauffe plus rapidement de 20 % et est à la première place mondiale pour la récurrence des catastrophes naturelles.
Il y a une urgence à préserver les grands réservoirs. Par exemple, la nappe phréatique chinoise va se tarir dans 5 ans. Le modèle économique mondiale est basé sur l’eau importée.
L’aménagement de territoires de certaines régions va avoir un impact sur le cycle de l’eau pour d’autres territoires. À titre d’exemple, la Région Grand Est est totalement dépendante de la Bretagne et de la Loire Atlantique pour ses ressources en eau (perturbations naissantes sur l’Atlantique). Une révolution globale sur la restauration des cycles de l’eau, travailler sur la restauration des sols est nécessaire pour amener la nature à se restaurer.
« Il y a aussi des milliards de cycles de l’eau : commencer à préserver chez nous, c’est préserver les autres. »
L’enjeu du 21e siècle est la prévention.
D.P. Il est nécessaire de mettre en mouvement les acteurs privés pour trouver des solutions. La puissance publique doit être régulatrice sur les usages de l’eau, dans les bassins versants. Mais la gestion doit associer le public, le privé et les collectivités.
S.P. La gouvernance de l’eau est avancée en France (AERM fêtent leur 60 ans). Les usagers sont bien représentés dans les comités de bassin. Mais les conflits d’usages sont importants et la société est mal structurée pour les gérer.
La question du renouvellement de la démocratie se pose. La gouvernance doit être repensée. Pour bien gérer l’eau, un sentiment de communauté doit être présent. Les modes de gouvernance doivent donc être inventés à toutes les échelles du niveau national au niveau local. Il est nécessaire de mieux impliquer les citoyens pour bien gérer l’eau, il faut une communauté. Il propose l’organisation d’un GIEC ou des COP de l’eau.
Le prix de l’eau risque d’augmenter ces prochaines années, pourquoi ?
S.P. Les réseaux vieillissants, les matériaux utilisés moins résistants, la dépollution… Les enjeux liés à ces problématiques renforcent la nécessité d’adapter les réseaux rapidement (renouvellement du réseau existant, développement de nouvelles connexions pour lutter contre les problèmes d’approvisionnement lors de sécheresses) et engendrera très probablement une augmentation du prix de l’eau. Une réflexion sur le tarif devrait être engagée : tester et expérimenter pour proposer des solutions (tarifs saisonniers, progressifs, etc.).
Une rupture complète du continuum de la recherche développement
D.P. Le rapport « Pesticides et agro-écologie : les champs du possible » rendu en 2014. La principale conclusion : engager un virage vers l’écophyto. De vrais progrès ont été réalisés mais l’objectif inscrit dans le Grenelle de l’Environnement de réduction de 50 % l’usage des produits phytosanitaires.
Les connaissances sur l’eau et le sol ne redescendent pas jusqu’aux exploitations agricoles. Actuellement, un désintérêt des agro-alimentaires et des agriculteurs pour l’usage de produits écophyto car les pertes économiques seraient grandes. Et pourtant, on fait porter toute la charge sur le monde agricole. La principale captation de la valeur est réalisée par l’agro-alimentaire et la distribution au détriment des agriculteurs. L’accompagnement du monde agricole est insuffisant pour évoluer.
Depuis 2 à 3 ans, dans l’alimentaire, les signes de qualité (bio principalement, labels…) s’effondrent pour des raisons de pouvoir d’achat des ménages. Conséquemment, on observe aujourd’hui une tendance à la baisse de la qualité de l’alimentation produite et mise sur le marché avec des conséquences sur la qualité de l’eau.
Sur 1/3 du territoire, il y a un risque avéré de potabilité de l’eau : impasse écologique, économique (coût de l’eau) et politique.
E.H. L’eau, est une question alimentaire. S’interroger sur la protection de la ressource en eau est donc un enjeu. « On mange 3 000 litres d’eau par jour. Environ 7 000 litres tout compris par habitant dans les pays européens ».