Rencontre régionale de l'eau
L’eau est un bien précieux
L’Agence Scalen a participé à la 2e édition de la Rencontre régionale de l’eau, organisée par la Région Grand Est, en partenariat avec les Agences de l’Eau Rhin-Meuse, Seine-Normandie et Rhône-Méditerranée-Corse, le 22 octobre 2024. Ce nouveau rendez-vous vise à rassembler experts et acteurs locaux pour échanger sur les défis de l’eau du Grand Est.
Introduite par Lionel Jacquemin, maire d’Heudicourt-sous-les-Côtes et Franck Leroy, président de la Région Grand Est, la Rencontrea pour objectif de rappeler que l’eau est un bien commun, à protéger, à partager et pour lequel nous devons faire preuve de solidarité.
« Plus nous travaillerons ensemble plus nous parviendrons à nous comprendre et à trouver des solutions collectivement. Ensemble, nous devons écrire un récit positif. Soyons à la hauteur des enjeux », Franck LEROY
Les conséquences du changement climatique sont vécues quotidiennement par les élus en région, par les habitants. Anticiper et mieux connaître les enjeux de l’eau est essentiel pour répondre aux défis de demain.
Le préfet de la région par intérim, Laurent TOUVET, a quant à lui mis l’accent sur la nécessaire réflexion collective en termes d’usage de l’eau car les tensions qui pèsent sur la ressource de l’eau sont croissantes.
« 100 000 habitants ont été concernés par le risque d’un manque d’eau en 2022 en région Grand Est ». Les conflits d’usage sont nombreux. Il faut donc un cap, donné par le Président de la République en mars 2023 : le plan Eau », Laurent TOUVET.
Au sein de la Région Grand Est, existe une volonté commune à conduire et à étoffer le plan eau en proposant une feuille régionale au sein de la réflexion de la planification écologique : il est ainsi décliné au sein des territoires par la COP régionale Grand Est Région Verte.
« Très rarement le cycle de l’eau verte est représenté »
Charlène DESCOLLONGES rappelle dans sa présentation introductive à cette journée que « 2/3 des précipitations à l’échelle mondiale proviennent des eaux vertes ».
L’eau verte est cette eau qui est stockée dans le sol et la biomasse. Elle peut être évaporée par les sols, ou absorbée puis évapotranspirée par les plantes. En termes de flux d’eau douce, c’est l’eau la plus importante. On sait de fait que les plantes gèrent elles-mêmes le cycle de l’eau. Elle se différencie de l’eau bleue qui est celle qui transite rapidement dans les cours d’eau, les lacs, les nappes phréatiques… vers la mer.
Les cycles des eaux vertes et bleues sont imbriqués et indissociables. Un lien qui montre l’importance de l’eau verte pour avoir de l’eau bleue à disposition, et pas des moindres : le rechargement des aquifères. L’eau qui recharge les aquifères, considérée comme eau bleue et pompée pour nos activités, passe en grande majorité par les racines des plantes. L’eau bleue naît de la richesse de l’activité végétale permise par l’eau verte. Plus on a de forêts, d’arbres et de champs couverts de végétaux sur son bassin versant, plus les cours d’eau sont dynamiques, et le risque de sécheresse moindre.
« En France, chaque habitant consomme 146 litres d’eau par jour. Mais en réalité, l’empreinte eau par français et par jour s’élève entre 5 000 et 9 000 litres d’eau ». Ces chiffres appellent à s’interroger sur comment optimiser son mode de vie pour réduire l'empreinte eau de ses biens, de l'énergie que l'on dépense et des services que l'on utilise ?
Depuis plus de 60 ans, en France, le cycle de l’eau est dégradé et le changement climatique accélère le problème.
« 3 milliards d’euros de dégâts sur les maisons (fissures) avec la sécheresse de 2022 ».
Il faut donc changer de paradigme : ralentir, régénérer et faire alliance avec le vivant. L’hydrologie régénérative basée sur un triptyque « eau, sol et arbre » est une solution pour des territoires résilients. Des aménagements peu coûteux existent et permettent la résilience de nos territoires.
L’eau et la planification écologique dans le grand est en 2024 : où en sommes-nous ?
Un retour sur les trajectoires et les démarches engagées a été présenté à l’assemblée.
La nécessaire adaptation au changement climatique s’accélère avec les orientations définies au niveau national par le Plan Eau. 4 axes de travail prioritaires ont été identifiés en Grand Est pour la mise en œuvre du Plan Eau :
- La sécurisation de l’alimentation en eau potable
- L’amélioration de la gestion quantitative dans les sous-bassins
- L’amélioration de la qualité des eaux des captages
- La préservation et la restauration des zones humides
« En Région Grand Est, 350 entreprises sont à risque en période de sécheresse (manque d’eau) ».
Ces axes se déclinent au travers des actions concrètes de Grand Est Région Verte. La Région propose un accompagnement pour adapter les territoires et économiser l’eau : « 75% des actions ont été enclenchées un an après l’adoption de la feuille de route, 300 projets mis en route ».
La tendance est à la sobriété mais des disparités territoriales existent. Les solutions existent et doivent être massifiées à l’échelle régionale. La trajectoire s’inscrit néanmoins dans celle indiquée dans le SRADDET et le Plan Eau. Un des principaux enjeux mis en avant : la gouvernance.
Des tables-rondes ont permis de croiser les regards et d’échanger avec les participants
Table ronde 1 « promouvoir la sobriété, s’appuyer sur les infrastructures naturelles - Interroger les possibilités/enjeux, optimiser les capacités, des solutions sans regrets».
L’intérêt des Solutions Fondées sur la Nature (SFN) a été rappelé. Ces solutions qui permettent de stocker l’eau dans le sol sont généralement peu coûteuses.
Qu'est-ce qu'une solution fondée sur la nature ? Les Solutions fondées sur la Nature sont définies par l'UICN comme : "les actions visant à protéger, gérer de manière durable et restaurer des écosystèmes naturels ou modifiés pour relever directement les défis de société de manière efficace et adaptative, tout en assurant le bien-être humain et en produisant des bénéfices pour la biodiversité".
Les Solutions fondées sur la Nature se déclinent en trois types d’actions, qui peuvent être combinées dans les territoires et avec des solutions d'ingénierie civile :
- La préservation d’écosystèmes fonctionnels et en bon état écologique ;
- L’amélioration de la gestion d’écosystèmes pour une utilisation durable par les activités humaines ;
- La restauration d’écosystèmes dégradés ou la création d’écosystèmes.
Le projet Ges’eau’r (appui scientifique pour la GEStion des EAUx souterraines dans le grand Ried), le plan herbe Meuse et la plateforme Maelia (Maelia est une plateforme, multi-agent, de modélisation et évaluation intégrées des territoires agricoles et systèmes de bioéconomie territoriale.) ont été présentées.
Voici les liens :
Table ronde 2 « adapter et optimiser les aménagements existants – les enjeux de la connaissance et de la gouvernance »
Les intervenants de cette table ronde ont mis l’accent sur la nécessité d’améliorer la connaissance pour mieux préparer l’avenir et assurer la gestion quantitative des eaux sur les territoires du Grand Est.
« L’importance de la connaissance : elle doit être riche et circuler librement », Vincent BARTOLI, responsable process Sucrerie – Cristal Union
L’exemple de la nappe de Craie a été cité : une étude a été réalisée afin de connaître les volumes d’eau prélevables dans cette nappe pour les différents usages (agriculture, industrie, alimentation en eau potable…).
VNF investit aussi l’amélioration de la connaissance (instrumenter toutes les prises d’eau avec un milliers de capteurs) et s’interroge sur l’utilisation de leurs infrastructures comme outil de résilience de leur territoire comme servir à de nouveaux usages comme l’agriculture pour le maraîchage.
Le groupe coopératif Cristal Union a présenté comment ils donnent une seconde vie à l’eau des betteraves sur le site de Pomacle-Bezancourt, dans la Marne : les racines sont composées à 75 % de liquide. Sur ce site, le groupe champenois le stocke dans de grands bassins pour le distribuer à la distillerie voisine Cristanol ou pour irriguer 30.000 hectares de cultures aux alentours.
Table ronde 3 « regards croisés : de nouveaux usages pour qui ? pour quoi ? acceptabilité sociale, multifonctionnalité, durabilité »
Le partage de la ressource et l’acceptabilité sociale a été mis en débat à l’occasion de cette dernière table ronde.
Les usages de l’eau sont multiples et nécessite de réfléchir au partage de cette ressource, de mieux la gérer. La connaissance des milieux et des besoins en quantité selon les usages est donc primordiale. Mais se pose la question de l’acceptabilité sociale à l’échelle collective mais aussi individuelle.
« Il est nécessaire d’avoir des instances de réflexion locale pour définir une stratégie collective d’usage de l’eau », Laurent ROUYER, président de la commission Agro-environnement à la Chambre Régionale d’Agriculture Grand Est
Des focus ont été proposés au cours de cette journée pour illustrer des démarches exemplaires en Grand Est
En voici quelques-uns :
- L’exemple du SAGE Rupt de Mad Esch Trey présenté par Gilles SOULIER, le président de la commission locale de l’Eau du SAGE
- Les paiements pour services environnementaux qui valorisent le changement des pratiques des agriculteurs, présentés par Rachel BURGY, présidente du syndicat des Eaux de la région messine
- La présentation du pôle de compétitivité Aquanova par Michel FICK, Président et Delphine KRIEGER, directrice générale déléguée et directrice Grand Est
- Le soutien d’étiage à partir de lacs réservoirs par Philippe RIBOUST, chef de service hydrologie – EPTB Seine Grands Lacs ; ainsi que celui possible par le lac de Pierre-Percée par Alexandre CHEVRIER, directeur EDF Hydro Est
Béatrice MOREAU, Vice-Présidente de la Région Grand Est en charge de l’agriculture, viticulture et forêt a conclu cette journée d’échange et de partage en rappelant que les territoires portent l’ambition commune de préserver la ressource en eau, que l’observatoire régional de l’eau est indispensable pour améliore la connaissance et mieux agir, qu’il faut s’adapter et échanger sur les actions portées par les territoires.
« Les mots clés d’aujourd’hui ; partage des enjeux, formation des acteurs, information des consommateurs, mobilisation, connaissance, sobriété acceptable, gouvernance collective ».